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Magda Si vous avez aujourd'hui des questions à me poser, des questions qui ont monté en vous depuis que nous nous sommes vus, j'essaierai de vous répondre tout simplement. Alors ne craignez pas, par vos questions, de me faire de la peine. Nous sommes vraiment en confiance et en vérité ensemble. Ruddy La dernière fois, vous nous avez parlé de la Hongrie et je voudrais savoir comment vous avez vécu votre jeunesse là-bas ? Magda (Silence) Nous étions simplement des Juifs hongrois bien intégrés dans la société. Nous n'étions pas riches, mais je n'ai pas le souvenir d'avoir eu faim. (Silence) Très tôt, j'ai senti que nous étions différents des autres. J'ai été retirée du Collège parce que j'étais juive et je n'ai pas pu continuer mes études. J'ai alors reçu un énorme choc. Je ne comprenais pas pourquoi nous étions soudain devenus haïssables. Je n'ai pas eu le temps de méditer sur notre sort car nous étions emportés par un torrent de haine frénétique. Je subissais le chaos comme si c'était irréel et, en même temps, je me sentais devenir une boule de haine. Ça alors ! (Silence) Au printemps de l'année 44, les gendarmes hongrois nous ont chassés de notre maison, ma mère, ma soeur et moi, uniquement parce que nous étions juives. Nos voisins se sont transformés en bêtes féroces. Je n'ai pas compris ce retournement. Les gendarmes nous ont conduits au ghetto, une immense briqueterie ouverte à tout vent. Je ne me souviens plus du temps que nous y avons passé. Les nazis hongrois, des civils et des gendarmes nous ont conduits à une gare où nous attendait un train composé de wagons à bestiaux. (Silence) Est-ce que j'ai été clair Ruddy ? Est-ce que j'ai bien répondu à ta question ?... Gilles Une question complémentaire à la question de Ruddy. A quel endroit de la Hongrie, habitiez-vous à ce moment là ? Magda J'habitais dans le Nord de la Hongrie, mais je suis née dans un petit village à la frontière tchécoslovaque. […] Lucille Avez-vous porté l'étoile ? Magda Bien sûr que tous les Juifs Hongrois ont porté l'étoile, à partir de mars 44. Mais je ne m'en souviens pas, tellement j'ai été choquée. Ruddy Est-ce que vous avez regretté d'être juive ? Magda Jamais. Jamais je ne pourrais regretter d'être juive. Mon identité n'est pas réduite à ma religion ni à ma nationalité, mais tout simplement à ce que je suis aujourd'hui. C'est comme toi Ruddy. Tu ne peux nier tes origines. Tu es noir. Au contraire, il faut essayer d'être de plus en plus fidèle à soi-même, sans nier quoique ce soit de ce qui te constitue comme personne. C'est une super question. Merci Ruddy. Florian Est-ce que votre famille a essayé de s'enfuir de Hongrie ? Magda Non, ma famille n'a jamais essayé de s'enfuir de Hongrie. Mais je sais que du côté de mon père beaucoup sont partis en Amérique. Jamais nous n'avions imaginé que nous serions exterminés. Avez-vous d'autres questions ? Audrey Par rapport à aujourd'hui, qu'est-ce qui vous a manqué le plus dans votre jeunesse ? Magda C'est la parole. Quand je suis arrivée en Belgique puis en France, j'ai été étonnée et émerveillée par la liberté de parole. Pour moi, c'était formidable que l'on puisse dire et exprimer le désir, la pensée, librement. Vous ne pouvez pas imaginer la chance de pouvoir aller voter, de vous exprimer, de vous révolter contre l'injustice, de dire aussi simplement votre joie de vivre. Chez moi, c'était tout à fait interdit. Qu'est ce qui constitue l'être si ce n'est pas la parole ? Élodie Je voulais savoir comment s'est passé le voyage vers Birkenau ? Magda Le voyage... Ce n'était pas un voyage, c'était un cauchemar. Nous étions environ deux mille juifs de la région rassemblés dans la briqueterie. Fin avril 44, nous avons été poussés dans des wagons à bestiaux. Il faisait très froid. Enfants, vieillards, bébés, femmes enceintes étaient entassés, sans eau, sans nourriture et sans hygiène. La plupart d'entre eux sont morts pendant le trajet. Au terme d'un voyage de trois jours qui restera gravé dans chaque parcelle de ma peau, nous avons débarqué à Auschwitz-Birkenau. J'étais convaincue que nous allions y travailler. C'était ce que les nazis nous avaient dit. Nous avons été rapidement séparées. Ma mère et ma soeur plus jeune de quatre ans à gauche et moi à droite. J'ai été sauvée par un déporté qui passait dans les rangs en soufflant : " Quand Mengele te demande ton âge, réponds dix huit ans...Dix huit ans ". D'instinct j'ai obéi. J'en avais quinze. Je n'ai pas pu dire au revoir à ma mère et à ma soeur... (Silence. Larmes). Je crois que nous ne pleurons que devant les personnes que nous estimons et nos larmes sont une expression de nous-mêmes. Les nazis n'ont pu enlevé mes sentiments d'humanité... C'est une baguette qui décidait de notre vie et de notre mort. Noyée dans la foule, rasée, dépouillée de mon identité, je suivais la masse qui marchait vers une destination qui nous était inconnue. Les nazis paradaient autour de nous avec leurs chiens et leurs fouets, les mains gantées et les bottes rutilantes. Ils étaient des êtres humains qui se comportaient comme des robots, sans regard humain. Ils étaient à leurs affaires, obéissant sans se poser de question. Ils avaient des lubies mortelles et ils aboyaient des ordres incohérents et souvent contradictoires. Quand je regardais un nazi, je n'étais rien. J'ai appris à ne pas les regarder pour ne pas être frappée par ce regard de mort... (Silence) Djamalidine Comment avez-vous vécu Birkenau ? Magda Souvent on me pose la question à propos du déroulement d'une journée. Comment se passait une journée dans le camp ? Toi, tu me poses la question du vécu. C'est super. Je n'ai pas vécu, j'ai survécu. La survie, c'est quoi ? Dans le vécu, nous faisons appel à notre responsabilité, tandis que dans la survie nous vivons une dépendance. Nous étions entièrement livrés au bon vouloir des nazis. Ils ont tout fait pour nous déshumaniser. Ils nous considéraient comme des sous-hommes. Ils voulaient vraiment nous voir comme des animaux pour se conforter eux-mêmes à l'idée que les Juifs ne valaient rien. Entre les déportés, il y avait encore des sentiments humains. En août 44, une mourante déjà squelettique a ouvert une main où il y avait quatre morceaux de pain moisi et elle m'a dit: " Mange-les. Tu dois vivre pour témoigner, pour que ça n'arrive plus jamais au monde ". Elle n'a pas dit plus jamais aux Juifs, elle a dit plus jamais au monde. Mon témoignage s'inscrit dans cette fidélité à la mémoire et il continue à vivre par la transmission. L'autre geste qui m'a sauvée la vie vient d'une compagne qui a humecté mes lèvres alors que je mourrais de déshydratation sous un soleil de plomb. Je n'ai jamais su d'où venait l'eau et de qui venait le geste à qui je dois la vie. Ce geste gratuit, ce don laisse dans mon coeur une immense gratitude. Vous voyez que les nazis n'ont pas eu raison de notre humanité et de notre solidarité. Lucille Dieu représentait qui pour vous ? Magda Dans les camps, Dieu était loin de mes préoccupations puisqu'il était sourd aux prières de mes frères qui, les mains tendues vers le ciel, l'imploraient. Il était aveugle devant ce carnage et toute cette souffrance endurée par son peuple dans l'indifférence totale. Par la faim, la soif et la promiscuité, les nazis nous rendaient ennemis les uns des autres. Nous cachions nos bouts de pain, nos sabots, nos cuillères, nos gamelles... Chaque fois qu'ils nous emmenaient à la désinfection, les kapos nous dépouillaient de tous nos biens si durement acquis. Nous devions alors voler ou en acheter d'autres avec une petite ration de pain. Il m'est arrivé de me retrouver pieds nus pour l'appel du matin. Nous nous battions pour un morceau de pain, pour une cuillerée de soupe ou pour une épluchure de pomme de terre. Notre kapo gardait pour elle notre pain, des fonds de bidons de soupe où se trouvaient de temps en temps de petits bouts de viande ou de pommes de terre, qu'elle troquait contre des robes et des foulards. Ainsi parée, elle se pavanait devant nous avec suffisance, nous qui n'avions plus rien. Elle suscitait en moi une haine envers elle et cette haine m'a permis de survivre. J'avais quelqu'un à haïr là où je n'avais personne à aimer. Comment croire en Dieu dans cette déchéance morale et physique ?... J'ai envie de partager avec vous ce qui m'est arrivé en août 44. Entre deux baraquements nous étions comptés et recomptés. Vous voyez cette aberrance ! Nous étions des moins que rien, mais les SS nous comptaient sans arrêt. S'il en manquait un, nous restions des heures et des heures sur place, par le froid ou la chaleur, jusqu'à l'épuisement. Lors d'un appel d'août 44, j'ai eu l'intuition que les mille personnes de mon baraquement, épuisées, étaient destinées à la chambre à gaz. Je savais que les SS nous comptaient cinq fois et que, si je ne voulais pas mourir avec mon baraquement, il fallait que je change de rang en quelques secondes. C'est cette intuition qui m'a sauvée la vie. Combien nous devons écouter notre intuition et ne pas la raisonner ? Le baraquement dans lequel je me suis glissée a été sélectionné avec sept cents autres femmes hongroises pour être envoyé à Walldorf, près de Frankfurt sur le Main, où nous avons bâti la première piste d'atterrissage pour les bombardiers allemands. (Des photos des baraquements du camp des Juifs hongrois, apportées par Magda, circulent parmi les élèves et Magda continue de partager sa mémoire) Gilles Quand vous étiez à Birkenau, c'était pendant l'été ? Magda D'après les documents retrouvés, je suis arrivée à Birkenau au début de mai 44. J'ai survécu quatre mois à Birkenau, là ou notre vie était limitée au maximum à un mois. Jennifer Quel est le camp où vous avez ressenti le plus d'émotion ? Gilles Vous avez été déportée à Birkenau, puis à Walldorf, comme vous venez de le dire, et ensuite vous avez été, avec les survivantes, déportée à Ravensbrück. Magda C'est à Zellertal que j'ai ressenti l'émotion la plus forte. C'était une petite ville de l'Allemagne des Sudètes. Après Ravensbrück, nous avons été déportées à Zellertal. Nous avons travaillé dans une usine de tissage. Là, nous avions des baraques et nous pouvions dormir une seule sur un châlit. C'était à Noël 44. Nous avons reçu une cuillère à soupe de sucre cristallisé, un morceau de pain et un petit bout de margarine. Quand j'ai vu cette cuillère de sucre cristallisé, j'avais l'impression qu'il y avait une cuillère d'étoiles devant mes yeux, une multitude d'étoiles dans cette cuillère. J'avais l'impression de rêver. J'ai regardé cela avec émerveillement. J'ai savouré une à une la douceur de ces étoiles qui fondaient sur ma langue. C'était extraordinaire. Vous ne pouvez imaginer l'émotion et le bonheur que j'éprouve encore aujourd'hui en vous le racontant. Audrey Nous sommes allés en plein hiver à Birkenau. Quand vous y étiez c'était l'été. Comment avez-vous ressenti la chaleur, l'odeur ? Magda Oh c'est épouvantable en été. C'est dur en hiver mais je ne l'ai pas connu. J'ai passé l'hiver à Ravensbrück, sous une tente. L'été à Birkenau a été une horreur d'autant plus que les crématoires fumaient du matin au soir. Le ciel était noirci de cendres. Nous étions plein de cendres sur nous. Gilles Pourriez-vous décrire cette photo ? Magda Ce petit lac est rempli de milliers d'êtres humains réduits en cendres. Un jour, je cassais les cailloux à Birkenau, j'ai été sélectionnée pour charrier les cendres du crématoire au petit lac. Pendant près de soixante ans, je n'ai pas pu en parler. Je suis une des rares survivantes de cette réalité car les nazis ne voulaient pas de témoins. (Silence) Allez les garçons. C'est difficile ? Osez poser des questions ! Christopher, c'est difficile de poser des questions ? Christopher Non, je vous écoute. Magda Cette écoute c'est quoi ? Christopher J'écoute ce que vous nous racontez. Magda Je vous sens tous à l'écoute. Pour moi, il y a une grande différence entre raconter et transmettre, mémoire et souvenir. Tu ouvres un album de photos et tu te souviens, tu racontes l'histoire qui te valorise ou qui te fait plaisir. Le souvenir c'est très émotionnel, très affectif. Tandis que la mémoire c'est plus un travail intérieur. Raconter dépend de notre état du moment, je peux ajuster à mon humeur. Raconter c'est plus léger. Je te raconte une histoire, une blague, un évènement, mais qui n'a pas de poids. La mémoire a du poids. Ici je ne raconte pas, j'essaie de transmettre pour que vous deveniez mes témoins fidèles à la mémoire. Je vois Christopher que tu réfléchis... Ruddy Est-ce que vous êtes retournée au lac ? Magda Oui les trois fois où je suis revenue à Birkenau, j'ai emmené le monde au lac. Aujourd'hui, dans ma transmission, j'essaie de rendre vivant tous ceux qui ont été assassinés. Ruddy Comment faites-vous pour rendre vivant ? Magda Est-ce que ce n'est pas vivant quand je te parle ? Tout ce que je transmets aujourd'hui de mon vécu tu le transmettras à ton tour. Tu deviens responsable de la mémoire pour que cela ne puisse plus jamais se reproduire dans le monde. La mémoire est inscrite dans ton quotidien de tous les jours, dans ta famille, dans ton collège et c'est de ce lieu de ton expérience que tu transmets. (Silence) Gilles Dans quelles conditions êtes-vous allée à Ravensbrück ? C'était un camp de concentration. Magda Il y avait des chambres à gaz. Gilles Est-ce que nous pourrions avoir plus d'éléments sur ce qui s'est passé après Walldorf et comment vous êtes arrivée à Ravensbrück ? Magda Nous sommes arrivées à Ravensbrück en novembre 44, il faisait moins 30°C. Nous sommes restées sous une tente pendant quelques jours. C'était une horreur, nous gelions et nous étions remplies de poux et de gale. Certains résistants déportés à Ravensbrück ne nous ont pas bien accueillis. Nous sommes restées peu de temps. Pour terminer, je suis entièrement convaincue qu'il y a en chacun de nous le meilleur et le pire et chaque jour, chacun de nous, nous sommes invités à choisir devant ces deux réalités. J'ai une foi à déplacer les montagnes qu'il y a en chacun de nous et en chacun de vous le meilleur et que vous deveniez celui qui appelle en l'autre ce meilleur. J'ai vécu avec vous un temps unique et merci d'être vous. 10 janvier 2006 Échanges réécrits par Magda Hollander-Lafon, Gilles Ollivier et Anita Rolland
Birkenau, l'extermination La mémoire, la vie Echanges entre les jeunes et Magda
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